Cinq ans après l’adoption de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, la Cour des comptes dresse un bilan mitigé de la réforme. Si la création de France compétences, la forte mobilisation du Compte personnel de formation (CPF) et l’importante augmentation du nombre d’alternants sont saluées comme des avancées positives, l’équilibre financier de ces dispositifs ne paraît pas soutenable. En parallèle, d’autres travaux d’ampleur ont été annoncés par le gouvernement, avec un fort impact anticipé sur l’écosystème emploi-formation :
France 2030 : des opportunités de financement importantes
Le plan d’investissement France 2030, lancé en 2021 et destiné à soutenir la transformation et l’innovation de secteurs clés, en lien avec les transitions numérique et environnementale et avec les objectifs de réindustrialisation fixés par le gouvernement, intègre un volet dédié à la formation et aux compétences. Un premier appel à manifestation d’intérêt « Compétences et métiers d’avenir » a été ouvert en 2021, permettant de financer, à date, près de 180 lauréats à hauteur de 800 millions d’euros. Deux catégories de projets ont ainsi été distinguées :
- Les diagnostics, qui visent à qualifier les besoins en formation et à évaluer l’adéquation de l’offre de formation existante ;
- Les dispositifs de formation et d’attractivité, qui sont destinés à compléter l’offre de formation existante après la réalisation d’un diagnostic, et doivent être adossés à un ou plusieurs objectifs de France 2030. On compte parmi les derniers lauréats annoncés, par exemple, plusieurs Campus des Métiers et Qualifications (CMQ) consacrés au développement de compétences en lien avec la transition environnementale.
En mai 2023, une deuxième saison de l’AMI a été lancée, avec un financement annoncé de 700 millions d’euros. Focalisés sur les dispositifs, les projets proposés doivent être portés par un consortium composé des employeurs ou de leurs représentants (petites, moyennes et grandes entreprises, comités stratégiques de filières, donneurs d’ordres et fournisseurs, groupements d’employeurs, organisations professionnelles, syndicats, fédérations professionnelles, OPCO, etc.) et des organismes de formation ou d’accompagnement (universités, écoles, lycées, CFA, organismes privés, Pôle emploi, etc.).
Les opportunités offertes par France 2030 ne doivent pas être sous-estimées : de nombreux profils de lauréats peuvent obtenir un financement, y compris des entreprises, des établissements de formation, des associations… Les AMI « Compétences et métiers d’avenir » sont l’opportunité de faire preuve de proactivité face aux évolutions engendrées par les transitions numérique et environnementale. KYU peut vous accompagner dans la construction des dossiers de financement, dans la réalisation de diagnostics, et dans la gestion de projets opérationnels. Récemment, nous avons eu notamment l’occasion de travailler avec l’Union des Transports Publics et ferroviaires (UTP) dans ce sens. Découvrez notre insight à ce sujet ici, ainsi que l’article d’AEF info et celui d’Actu Environnement.
Eriger la voie professionnelle en « cause nationale »
Les contours de la réforme du lycée professionnel ont été annoncés par le président de la République début mai 2023.
Alors qu’on reproche parfois aux formations professionnelles d’être trop éloignées de la réalité et des besoins du monde du travail, l’un des objectifs affichés est de renforcer les liens entre école et entreprises, notamment via :
- L’augmentation de la durée des stages pour les élèves souhaitant se professionnaliser ;
- La gratification des stages, a priori prise en charge par des subventions publiques ;
- La mise en place de « bureaux des entreprises » au sein des lycées pour aider les élèves à trouver des stages ;
- La mobilisation de professeurs associés issus du monde de l’entreprise, qui consacreraient un après-midi par semaine à la formation des jeunes.
Face au constat que le nombre de personnes formées aux métiers en tension est largement en-deçà des besoins des entreprises, tandis que d’autres formations n’offrent pas suffisamment de débouchés, le gouvernement a également annoncé la fermeture de 80 filières et l’ouverture de 150 autres. Les nouvelles classes ouvertes doivent notamment permettre de répondre aux forts besoins en recrutements dans les domaines industriel, du génie thermique ou de la chaudronnerie, en améliorant le maillage territorial des formations.
Pour renforcer l’adéquation de l’offre de formation aux besoins du marché et aider les jeunes à s’orienter, chaque filière devra aussi afficher ses taux d’insertion, d’emploi et de poursuite d’étude.
Bien que la mise en œuvre effective de cette réforme pose question, en raison des moyens qui devront être mobilisés par les lycées et les entreprises, les ambitions affichées vont dans le sens des besoins exprimés par les entreprises quant à l’amélioration de « l’employabilité » des jeunes. Les expertises développées par KYU permettent de répondre aux enjeux soulevés par la réforme, en particulier la cartographie et l’analyse de l’adéquation de l’offre de formation, ainsi que le recensement des métiers/compétences en tension et l’analyse des facteurs de tension. L’outil de statistique publique que nous avons créé, Komète, regroupe déjà une grande partie des données que les établissements vont avoir l’obligation d’afficher. De nouvelles opportunités pour mettre en place des partenariats avec le monde académique pourraient aussi se présenter pour certains de nos clients, afin de pallier leurs difficultés de recrutement via l’apprentissage par exemple.
Des exigences de plus en plus fortes pour la mise à jour et l’enregistrement des certifications
La ministre déléguée chargée de l’Enseignement et de la Formation professionnels, Carole Grandjean, a annoncé la mobilisation de moyens supplémentaires pour la mise à jour des titres et diplômes. L’objectif est que, dès 2025, 100 révisions de titres et diplômes puissent avoir lieu chaque année, contre 30 aujourd’hui (sur un total de 550 disponibles dans les lycées professionnels), grâce à une équipe dédiée de 35 personnes.
Cela s’inscrit dans une démarche plus globale de rationalisation et d’amélioration de l’offre de formation et de certification, entreprise avec la création de France compétences.
Si ces annonces se concrétisent, cela impliquera des investissements accrus de la part des certificateurs pour effectuer une veille efficace et mettre à jour leurs référentiels, alors que les branches professionnelles rencontrent déjà des difficultés pour répondre à l’ensemble des critères nécessaires pour faire enregistrer leurs certifications au RNCP (Répertoire national des certifications professionnelles) et au RS (Répertoire spécifique).
Depuis 2020, KYU soutient de nombreuses branches professionnelles et des organismes de formation dans la mise à jour et l’enregistrement de leurs certifications. Aujourd’hui, au vu des exigences accrues de France compétences, nous avons à cœur d’inscrire nos travaux d’ingénierie de certification dans des stratégies globales, avec une attention toute particulière concernant les études d’opportunité. Ces études permettent, si l’opportunité est avérée, de constituer des dossiers solides et de justifier la valeur d’usage des certifications déposées.
Une VAE 2.0 ?
La validation des acquis de l’expérience (VAE) constitue la promesse d’obtenir un diplôme sans retourner sur les bancs de l’école, en faisant reconnaître l’expérience acquise en exerçant un métier. Créé il y a vingt ans, le dispositif ne convainc pas totalement, avec un nombre de candidats et un taux de réussite encore largement en-deçà des objectifs.
L’ambition du gouvernement est d’atteindre 100 000 candidats par an d’ici la fin du quinquennat, et un projet de loi portant sur la VAE a ainsi été adopté début 2023. Diverses mesures ont été annoncées pour simplifier la procédure, moderniser le dispositif et renforcer l’accompagnement et la flexibilité proposés aux candidats dans leurs parcours. Dans cette optique, France VAE, un portail de service public dédié à ce dispositif, vient d’être créé à la suite de l’expérimentation REVA (Reconnaissance et Valorisation) conduite d’octobre 2021 à juin 2023.
En parallèle, une expérimentation « VAE inversée » de trois ans vient d’être lancée par le ministère du Travail, du Plein emploi et de l’Insertion, afin que des actions permettant de faire valider les acquis de l’expérience soient intégrées aux contrats de professionnalisation dans des secteurs rencontrant des difficultés de recrutement importantes.
Cette amélioration de la VAE, si elle s’avère concluante, sera un levier d’action à renforcer dans les stratégies de formation et de certification des branches professionnelles. Participer à l’expérimentation sur la VAE inversée dans les secteurs où l’apprentissage est bien développé constitue également une piste intéressante ; nous avons commencé à accompagner des clients pour adresser une demande en ce sens au Ministère du Travail.
Le plein emploi et la mobilité professionnelle au cœur des préoccupations sociales et politiques
Autre sujet majeur à l’agenda politique et social du gouvernement : la transformation attendue de Pôle emploi en France travail, qui regroupera également le périmètre actuel des missions locales et de Cap emploi. L’objectif affiché est de constituer un interlocuteur unique et mieux identifié pour les personnes en recherche d’emploi, mais des inquiétudes subsistent, notamment autour de l’importante centralisation qu’elle pourrait engendrer parmi les opérateurs de l’emploi, et des obligations accrues qui seront exigées des demandeurs d’emploi. Notre équipe a organisé un débat pour mieux appréhender les positions des principaux acteurs de l’emploi-formation et mis au point un livre blanc à ce sujet. Retrouvez notre article dédié ici.
Par ailleurs, des annonces sont attendues à l’automne sur les reconversions professionnelles, après l’ouverture de concertations avec les partenaires sociaux à la rentrée. On observe aujourd’hui une disparité de notoriété et de mobilisation des dispositifs de reconversion et de mobilité professionnelle existants au niveau individuel (CPF et CPF de transition, bilans de compétences, VAE, Conseil en évolution professionnelle, projet de transition professionnel, Pro-A, CléA…) ou collective (Transitions collectives). L’enjeu est donc de mieux faire connaître les outils et dispositifs existants, tout en solidifiant leur modèle économique afin de garantir leur viabilité et pérennité.
Alors que l’écosystème emploi-formation se complexifie et se politise de plus en plus, les travaux de veille, de prospection et de réflexion collective que nous effectuons sont indispensables pour jouer notre rôle de conseil et continuer à formuler des préconisations opérationnelles.
Si vous souhaitez être accompagnés pour saisir les opportunités des nouvelles réformes dans le champ de l’emploi et de la formation professionnelle, n’hésitez pas à nous contacter !