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Place des femmes dans le sport et sa gouvernance : y a-t-il eu un « effet JOP » ?

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Place des femmes dans le sport et sa gouvernance : y a-t-il eu un « effet JOP » ?

Plus de six mois après des Jeux Olympiques et Paralympiques qui promettaient une « parité parfaite », et à l’occasion de la Journée internationale des droits de la femme, l’équipe KYU vous propose d’analyser à nouveau des chiffres clés sur la place des femmes dans le sport, pour déterminer si un effet positif lié aux JOP a pu être observé. 

Une parité imparfaite mais un effet positif sur la pratique et la médiatisation du sport féminin 

Le pari de Jeux paritaires a globalement été tenu, bien qu’on ne puisse pas parler de parité réellement parfaite : 

  • Des disparités ont été constatées selon les délégations nationales et les sports (lutte, équitation, football …) ; 
  • Seules 45% de femmes concouraient parmi les athlètes paralympiques. 

On retiendra néanmoins le caractère historique de ces Jeux, qui couronnent un long chemin vers l’égalité des genres : lors des JO de Paris en 1900, les premiers autorisant les femmes à participer, seules 22 d’entre elles ont pu prendre part, soit 2,2% du nombre total de concurrents. Le seuil de 25% a été atteint à Séoul en 1988 ; celui de 40%, à Athènes en 2004. En 2020, à Tokyo, elles composaient 47,8% des délégations. 

Les JOP de Paris 2024 ont également permis aux compétitions féminines de bénéficier d’une plus grande visibilité et médiatisation. Une étude de l’ARCOM a établi que, sur l’ensemble du volume horaire de retransmission d’épreuves des Jeux Olympiques et Paralympiques, 37% était consacré à des compétitions féminines (contre 56% de sport masculin et 7% de sport mixte). Cette part atteint 42% s’agissant des seuls Jeux Olympiques. Loin de la parité, ce chiffre traduit néanmoins une nette amélioration par rapport aux éditions précédentes. L’étude note en parallèle que 18% du temps de parole durant la retransmission télévisuelle des JOP était « occupé » par des commentatrices. La parole des femmes était encore plus réduite lors des épreuves masculines ainsi qu’aux heures de grande écoute. 

En termes de pratique sportive, l’INJEP (Institut National de la Jeunesse et de l’Education populaire) a d’ores et déjà constaté un petit effet JOP, avec une augmentation de 5% du nombre de licences délivrées à la rentrée 2024 par rapport à l’année précédente. L’effet est un peu plus important pour les femmes, avec une hausse de 6%. Cela semble confirmer que les grands événements sportifs, ainsi qu’une plus grande visibilité donnée aux athlètes féminines, peuvent avoir un réel impact pour encourager les femmes à faire du sport. 

Une gouvernance sportive encore sous-féminisée 

En 2024, nous nous étions déjà intéressés à la gouvernance du sport et avions relevé que fin 2022, 81 des 119 fédérations reconnues par le ministère des Sports étaient présidées par des hommes, y compris lorsque les femmes constituent une majorité écrasante des licenciés. Fin 2024, des élections ont eu lieu et le nombre de présidentes à la tête de l’une des 35 fédérations olympiques d’été est resté stable – et faible. Parmi ces 35 fédérations, 2 sont présidées par des femmes : la FFGym, avec Dominique Mérieux à sa tête, première femme à occuper le poste ; ainsi que la Fédération Française de Lutte, qui a élu à la présidence un tandem constitué de Lise Legrand et Jean-Carl Fossati. 

Ainsi, la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France, qui imposait aux fédérations de présenter des listes strictement paritaires au niveau national, présente un bilan plus que mitigé en ce qui concerne les postes à plus haute responsabilité. Cette obligation, censée s’appliquer au niveau local à partir de 2028, a été décriée par certaines fédérations qui ont des difficultés à trouver suffisamment de femmes intéressées. Sa mise en œuvre concrète pourrait être remise en question d’ici là. 

Le Comité International Olympique (CIO) souhaite faire figure d’exemple et a entrepris de grands efforts pour féminiser ses instances. En 2023 néanmoins, les femmes ne représentaient que 41% des membres du CIO – ce qui constitue pourtant une augmentation de 100% par rapport à 2013. 

Des femmes toujours peu présentes dans les métiers du sport  

La féminisation du sport doit également s’analyser dans le monde professionnel. Or, là non plus, la parité est très loin d’être atteinte. Le nombre de salariées de la branche professionnel augmente en volume, dans un contexte de recrutements importants dans le secteur, mais le taux de féminisation, lui, a baissé, s’établissant à 35% des effectifs (contre 37% en 2019). 

Les femmes continuent d’être davantage représentées à certains postes ou dans certaines spécialités bien spécifiques (développement des activités, notamment métiers support et administratifs, santé et soins…). Leur part diminue sensiblement parmi les fonctions d’éducateurs sportifs en club (moins d’un quart), qui représentent pourtant 38% des effectifs de la branche. Elles sont également plus nombreuses à exercer à temps partiel et moins nombreuses dans les groupes de classification conventionnelle les mieux rémunérés (17% du groupe 7, « cadre dirigeant »). En neutralisant les effets de structure (âge, ancienneté, position de l’emploi occupé dans la classification…), on note un écart de rémunération de 4,5% entre hommes et femmes. Le rapport emploi-formation souligne également que la note moyenne de l’index de l’égalité professionnelle est plus bas dans la branche du sport (78,4/100) que dans l’ensemble de l’économie (87,5/100). 

En parallèle, leur place au sein des formations initiales progresse très lentement (41% des effectifs en licence STAPS, 30% en BJEPS Sport) et leurs choix de filières et de sport demeurent genrés (équitation, gymnastique ; activité physique adaptée et santé, éducation et motricité). 

Conclusion : un « effet JOP » positif mais largement insuffisant  

Les grands événements tels que les JOP ont un vrai rôle à jouer pour inciter les femmes à s’engager davantage dans le monde du sport, et cette question devra continuer à être portée lors des grandes compétitions nationales et internationales à venir. 

Néanmoins, « l’effet JOP » reste marginal par rapport aux enjeux de socialisation, de visibilité et d’accompagnement des femmes au quotidien et depuis leur plus jeune âge, qui expliquent leur présence encore faible dans le monde du sport. 

Sources : 

  • ARCOM, « La place des femmes dans les médias audiovisuels et numériques durant les Jeux de Paris 2024 », janvier 2025. 
  • CIO, « Egalité des genres à travers le temps », février 2025. 
  • INJEP, « Les licences sportives annuelles au sortir des Jeux de Paris 2024 », janvier 2025. 
  • Observatoire des Métiers du Sport, « Rapport Emploi-Formation de la branche du Sport, édition 2024 », octobre 2024. 
  • Le Monde, « JO 2024 : les promesses de parité pas encore respectées en lutte gréco-romaine, natation artistique, gymnastique rythmique… », août 2024. 
  • Le Monde, « Les fédérations sportives au défi de la parité femmes-hommes », octobre 2024. 
  • Le Monde, « Toujours aussi peu de femmes à la tête des fédérations sportives françaises, malgré la loi sport visant la parité », décembre 2024

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